# Le mouvement en train de se faire de Gilles Deleuze
J'avais parlé dans un précédent post (celui sur Hussein Chalayan) du concept (le mot le plus galvaudé de l'architecture française mais il s'agit ici de philosophie, il est donc approprié) de "mouvement en train de se faire", voici donc un post qui lui ai consacré.
Gilles Deleuze en avait parlé lors d'un de ses cours (disponible en CD) à l'université de Vincennes le 24 février 1987 portant sur la philosophie de Leibniz et la damnation (sont damnés ceux qui meurent en haissant Dieu --> allez voir l'excellent film coréen Secret Sunshine en ce moment au cinéma !).
Bon nous ne sommes pas des philosophes et sans doute peu d'entre nous (pas moi en tout cas) peuvent saisir l'entière complexité de ce concept, mais nous pouvons néanmoins en retirer l'idée qu'une architecture ne se vit ni au passé ni au futur mais bel et bien au présent et peut sans doute être dessinée comme quelque chose qui ne cesse de se "faire". Pourquoi la ville serait elle figée quand elle pourrait se recréer continuellement ?
Voici l'extrait en question:
Ce qui définit la perfection de l'acte, ce n'est pas qu'il soit fait, c'est que le mouvement par lequel il se fait ait une unité. Il faut une unité du mouvement entrain de se faire. Et bien voilà, qu'est-ce qui donne à un mouvement de l'unité ? Le mouvement par lui-même ? Non c'est un pur relatif. Relativité du mouvement. Ce qui donne une unité au mouvement c'est l'âme, c'est l'âme du mouvement. Seule l'âme est l'unité du mouvement. Si vous en restez au corps vous pouvez aussi bien attribuer un mouvement aussi bien au corps A que au corps B. Il y a une relativité absolue du mouvement. Seule l'âme est capable de donner une unité au mouvement. Bien. Qu'est-ce que c'est que l'acte parfait ? Vous allez comprendre : l'acte parfait c'est l'acte qui reçoit de l'âme qui l'inclus l'unité d'un mouvement en train de se faire. C'est vous dire à quel point l'acte parfait n'est pas l'acte une fois fait, c'est le contraire. C'est l'acte présent, c'est l'acte qui se fait, mais qui reçoit de l'âme l'unité d'un mouvement en train de se faire, qui reçoit de l'âme l'unité nécessaire. A quelle condition reçoit-il cette unité ? A condition d'être inclus dans l'âme, d'être inclus au présent. Je termine avant de vous demander si vous comprenez bien, nouvelle définition de l'acte libre, je disais tout à l'heure et soyez sensible à ceci que c'est vraiment la même chose, on passe d'une définition à l'autre de manière continue. Je disais d'abord : l'acte libre c'est l'acte qui exprime le moi, c'est à dire qui exprime l'âme dans toute son amplitude a un moment de la durée, et je dis maintenant que l'acte libre c'est celui qui reçoit de l'âme qui l'inclus, c'est l'acte pressent, qui l'inclus présentement, c'est l'acte présent qui reçoit de l'âme qui l'inclus l'unité d'un mouvement en train de se faire. Et voyez je peux recommencer : bien sur dans la journée c'est rare que je fasse des actes libres. La question de la liberté ça se pose au niveau de l'importance, c'est quand j'ai quelque chose à faire qui m'importe, oui là la question de la liberté me concerne. C'est très rare les actes où il est important qu'ils reçoivent de l'âme l'unité d'un mouvement en train de se faire. Sinon il y a toutes sortes de mouvements qui se font tout seuls : marcher, aller dans la rue, tout ça, et puis tout d'un coup il y a un moment ou il me faut de l'âme, il ne m'en faut pas tout le temps, d'abord c'est épuisant ces histoires d'amplitude de l'âme. Je ne sais pas si vous sentez ayez une âme ample ! Pourquoi avoir une âme ample, après tout je ne l'ai pas encore dit. Pourquoi pas se contenter d'avoir une toute petite amplitude ? C'est qu'il y a plein de gens qui se contentent d'une toute petite amplitude, mais ils feront des actes libres du moment que les actions au présent qu'ils font reçoivent l'unité d'un mouvement en train de se faire, c'est à dire du moment que leurs actions expriment l'amplitude de leur âme quelle qu'elle soit…
Fi des inaugurations, photos bien propres de publications etc. l'architecture ne doit pas être un acte fini mais un acte en train de se faire, un processus qui meurt en même temps que le bâtiment lui même. Comment ? A vous de me le dire !
Allez je vous donne un petit indice innofensif signé Sanfte Strukturen que je trouve très beau.
Pour lire le cours de Deleuze en entier, direction http://www.webdeleuze.com/php/texte.php?cle=139&groupe=Leibniz&langue=1
Si la philosophie de Gilles Deleuze vous intéresse, je vous conseille (parce que c'est clair, facile et super intéressant) les dvds de l'ABCDEraire qui, sauf erreur de ma part, sont trouvables à la bibliothèque de l'ESA (si ils ne le sont pas il faut les réclamer !!!)
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